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Définition de «service continu»

La définition de «service continu» prévue à la Loi sur les normes du travail n'impose pas qu'il n'y ait que 1 seul et même contrat de travail ni que le service soit acquis dans une même fonction; un aspirant-pompier devenu journalier bénéficiait donc de 2 ans de service continu lorsque l'employeur a mis fin à sa période de probation, et ce, sans cause juste et suffisante.
31 mars 2025

Intitulé

Lussier c. Municipalité de Saint-Édouard, 2024 QCTAT 4477

Juridiction

Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Montérégie

Type d'action

Plainte en vertu de l'article 124 de la Loi sur les normes du travail (L.N.T.) à l'encontre d'un congédiement — accueillie.

Décision de

Michel Maranda, juge administratif

Date

11 décembre 2024


Décision

Le 29 août 2022, le plaignant a commencé un emploi de journalier parallèlement à la fonction d'aspirant pompier qu'il occupait depuis le 1er juin 2021 — sa période de probation de 6 mois a été prolongée pour tenir compte d'une absence pour cause de maladie ayant pris fin le 9 avril 2023 — à son retour, le plaignant travaillait uniquement comme journalier — il conteste sa fin d'emploi survenue le 19 juin 2023 — l'employeur prétend que la plainte n'est pas recevable puisque le plaignant ne justifie pas de 2 ans de service continu — il affirme que le point de départ du calcul du service continu du poste de journalier se situe au 29 août 2022 — le Tribunal est d'accord avec le plaignant, qui situe plutôt le début de son service continu à son premier jour de travail comme aspirant pompier — la définition de «service continu» prévue à la loi n'impose pas qu'il y ait 1 seul et même contrat de travail durant la période visée pour continuer de l'accumuler — la loi n'exige pas non plus que le service continu s'acquière dans 1 même fonction — le plaignant n'a jamais cessé d'être la même personne salariée liée par contrat au même employeur — sa démission uniquement à titre d'aspirant pompier n'a en rien compromis son lien d'emploi — l'employeur soutient que la période de probation imposée comme journalier ne tenait aucunement compte de la période antérieure travaillée comme aspirant pompier — cet argument ne lui est d'aucun secours pour tenter de situer le point de départ du service continu à une date ultérieure à l'embauche — le Tribunal conclut que le plaignant justifiait de 2 ans de service continu au moment de son congédiement — la plainte est recevable.

L'employeur soutient que le prisme d'analyse de l'article 124 L.N.T. n'est pas applicable au plaignant puisqu'il était en probation au moment de sa fin d'emploi — il affirme que le Tribunal doit uniquement vérifier si sa décision était abusive, de mauvaise foi ou discriminatoire — suivre cet argument reviendrait à faire fi d'une disposition d'ordre public de la loi — à partir du moment où un salarié atteint 2 ans de service continu, l'employeur doit respecter la protection offerte par l'article 124 L.N.T., et ce, même s'il lui permet d'occuper une toute nouvelle fonction — en l'espèce, la lettre de fin d'emploi se limitait à recenser quelques comportements fautifs qui relevaient de l'insubordination et de la négligence du plaignant dans l'exécution de ses fonctions — il n'a pas été contesté que le plaignant n'avait reçu que quelques avertissements verbaux et que son dossier disciplinaire était vierge — il n'a jamais été informé que son emploi pouvait être en péril — même tenues pour avérées, les fautes reprochées au plaignant ne sauraient être suffisamment graves pour passer outre au principe de la progression des sanctions — le congédiement est annulé — la réintégration est ordonnée.