Intitulé
Syndicat des métallos, section locale 7801 et Métallurgie Gastech inc. (Stevy Lemay et un autre), 2024 QCTA 500
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Grief contestant un congédiement. Accueilli. Objection préliminaire à l'arbitrabilité du grief. Rejetée.
Décision de
Me Richard Marcheterre, arbitre
Date
5 novembre 2024
Le syndicat soutient que le plaignant a été congédié de manière abusive, alors que sa période de probation n'était pas terminée. L'employeur fait valoir que, en raison de son statut, ce dernier n'a pas droit à la procédure de grief.
Décision
La Cour suprême du Canada a clairement énoncé dans Parry Sound (District), Conseil d'administration des services sociaux c. S.E.E.F.P.O., section locale 324 (C.S. Can., 2003-09- 18), 2003 CSC 42, SOQUIJ AZ-50192747, J.E. 2003-1790, D.T.E. 2003T-923, [2003] 2 R.C.S. 157, qu'un employeur doit respecter toute mesure d'ordre public dans ses rapports avec l'ensemble de ses employés, sans égard au statut et au-delà de toute convention collective. Depuis, la jurisprudence a établi que, si la convention collective prive un salarié du droit de soumettre un grief à l'encontre de son renvoi, ce dernier a tout de même droit à cette procédure si la preuve démontre que, en mettant fin à son emploi, l'employeur a contrevenu à des règles d'ordre public, notamment aux articles 6 et 7 du Code civil du Québec. En l'espèce, le syndicat a démontré que l'employeur avait géré de manière abusive la probation du plaignant. En effet, l'employeur n'a pas validé les renseignements qu'il détenait quant à la performance du plaignant et il a fait fi des observations favorables de plusieurs personnes, dont certaines qui étaient chargées de la formation et de la supervision du plaignant. Il a également agi de manière déraisonnable en refusant de s'adresser au plaignant au motif qu'il n'avait pas à faire de la discipline auprès d'un employé en probation. Or, une discussion avec un employé en période de probation n'a pas nécessairement à être de nature disciplinaire. Il peut s'agir d'une occasion pour l'employeur de communiquer ou de réitérer ses attentes tant professionnelles que personnelles, sans quoi il prive l'employé de la chance d'améliorer sa performance et d'ajuster son attitude. Le Tribunal conclut que le plaignant avait le droit de recourir à la procédure de grief en vertu des règles de droit public, lesquelles ont préséance sur la convention collective.
Quant au fond, l'employeur a mis fin à la probation du plaignant parce qu'il estimait que celuici parlait et que, par conséquent, il perdait son temps et avait une incidence négative sur la production. Or, non seulement la preuve est floue sur cette question mais, en outre, le plaignant n'a jamais été avisé de ce reproche. La décision de le congédier est fondée sur une appréciation superficielle de sa performance et n'est pas conforme à la preuve indiquant qu'il était apprécié de ses collègues ainsi que de ses superviseurs et de ses formateurs. Si le plaignant n'était pas un employé modèle aux yeux du directeur, il devait en être avisé afin qu'il puisse améliorer son comportement en vue de la réussite de sa probation. L'employeur a confondu la discipline avec la gestion normale d'un employé, notamment lorsque celui-ci est en période de probation. Un employeur raisonnable placé dans la même situation n'aurait pas congédié le plaignant. Il convient donc d'ordonner la poursuite de sa période de probation.