Intitulé
Métaux Garon et Racine ltée, 2024 QCTAT 4076
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division de la santé et de la sécurité du travail (T.A.T.), Chaudière-Appalaches
Type d'action
Contestation par l'employeur d'une décision relative à un partage des coûts. Contestation rejetée.
Décision de
Julie Samson, juge administrative
Date
8 novembre 2024
Le travailleur a subi une lésion professionnelle en se fracturant un membre. L'employeur a demandé un partage d'imputation au motif que le travailleur présentait une déficience au moment de la survenance de la lésion, soit les conséquences de l'utilisation d'une vapoteuse contenant du tabac, lesquelles auraient retardé le processus de guérison de la fracture. La CNESST a rejeté la demande et cette décision a été confirmée à la suite d'une révision administrative.
Décision
Selon l'employeur, le travailleur utilisait une vapoteuse contenant du tabac, tel que cela a été noté par 2 professionnels de la santé, et cette utilisation a entraîné chez lui des effets au moins semblables à ceux des cigarettes conventionnelles. Or, la lecture des rapports de ces professionnels de la santé ne permet pas de confirmer cette dernière allégation. Le Tribunal précise que les produits de vapotage ne contiennent pas de tabac. Les liquides de vapotage peuvent cependant contenir de la nicotine, laquelle est souvent issue de plants de tabac. Or, la preuve au dossier est muette quant à la quantité de nicotine qui aurait été consommée de façon quotidienne par le travailleur. On ignore également quel type de fumeur il était auparavant, soit le nombre d'années durant lesquelles il a fumé et la quantité de cigarettes qu'il consommait. Dans ces circonstances, assimiler l'utilisation de la vapoteuse à une consommation de tabac au moyen de cigarettes conventionnelles est une pure hypothèse. En outre, l'opinion du médecin de l'employeur n'est pas retenue comme probante. Littérature médicale à l'appui, celui-ci est d'avis que la consommation de tabac a entraîné une dégradation des produits d'angiogenèse, et plus précisément une diminution de la formation de nouveaux vaisseaux sanguins permettant l'apport de nutriments nécessaires à la consolidation osseuse. On ne sait toutefois pas si la quantité de nicotine contenue dans le liquide de vapotage équivaut à celle contenue dans une cigarette conventionnelle, et le médecin n'a pas abordé cette question. Quant aux articles de littérature médicale auxquels il a fait référence, ils sont de peu d'utilité, le premier traitant d'études expérimentales sur des souris et des rats et l'autre se basant sur un échantillon limité. Enfin, comme le soulignait le Tribunal dans Eskimo Express inc. (T.A.T., 2023-11-23), 2023 QCTAT 4974, SOQUIJ AZ51986085, 2024EXPT-198, ce n'est pas tout type de tabagisme qui peut constituer une déficience. Il est d'autant plus important de détenir les données de base quant à la consommation de nicotine du travailleur puisque, dans le présent dossier, il est question de l'utilisation d'une vapoteuse, dont les effets ne sont pas encore bien connus. Par conséquent, l'employeur n'a pas démontré que le travailleur était porteur d'une déficience et demeure imputé de la totalité des coûts.