Intitulé
Syndicat du personnel occasionnel de Québec (FISA) et Ville de Québec (Antoine Caron-Jobin), 2024 QCTA 445
Juridiction
Tribunal d'arbitrage (T.A.)
Type d'action
Grief contestant un congédiement. Accueilli en partie. Moyen préliminaire relatif à la procédure préalable. Rejeté.
Décision de
Me Hélène Bédard, arbitre
Date
7 octobre 2024
Le plaignant, qui occupait le poste de préposé aux activités de loisir, a été congédié au motif qu'il aurait travaillé et conduit un véhicule de l'employeur alors qu'il avait les facultés affaiblies, mettant ainsi en danger la santé et la sécurité des citoyens ainsi que la sienne. On lui reproche également d'avoir déclaré des heures non travaillées ainsi que d'avoir utilisé son temps à des fins autres que le travail. Outre sa contestation de la mesure, qu'il estime trop sévère, le syndicat soutient que la lettre de congédiement n'est pas conforme à la convention collective puisqu'elle ne détaille pas les fautes reprochées.
Décision
La convention fait référence à une convocation préalable à l'imposition d'une mesure disciplinaire et à un avis écrit informant le salarié de la sanction. Dans le premier cas, il faut exposer au plaignant les faits reprochés, ce qui a été fait en l'espèce. Dans le second, il convient de l'informer des motifs. En l'espèce, l'employeur a précisé au plaignant qu'il le congédiait «en raison de la gravité des fautes commises», lesquelles étaient énumérées dans l'avis de convocation, et parce qu'il avait rompu le lien de confiance. Dans un tel contexte, il est faux de soutenir que le plaignant ne savait pas pourquoi on le congédiait. Le moyen préliminaire est rejeté.
Quant au fond, les fautes — lesquelles sont toutes survenues lors d'une même fin de semaine — relatives aux pertes de temps et aux heures inexactes inscrites sont importantes, mais elles sont secondaires au manquement principal, qui est d'avoir travaillé avec les facultés affaiblies. Ce manquement est d'un degré de gravité élevé et mérite donc une sanction sévère, dont la justesse doit être évaluée à la lumière des circonstances aggravantes et atténuantes. À cet égard, le Tribunal retient l'autonomie dont jouit le plaignant dans l'exécution de ses fonctions et le haut degré de confiance que lui accorde l'employeur. Pourtant, le plaignant a travaillé et a conduit durant une journée entière dans un état qui mettait en péril la sécurité et la santé de ses collègues et des citoyens ainsi que les siennes. Qui plus est, c'est en prenant des somnifères non prescrits et une drogue illégale qu'il s'est mis dans cet état avant d'arriver au travail. Ces manquements auraient pu avoir des conséquences désastreuses. Avant d'être arrêté par la police, il a même heurté un citoyen parce qu'il s'endormait au volant, mais celui-ci n'a pas été blessé. Il va de soi que de travailler sous l'effet d'une drogue est prohibé par tout employeur. En l'espèce, l'employeur l'interdit expressément dans le règlement R.V.Q. 1856 sur l'éthique et les règles de conduite des employés de la Ville de Québec. En revanche, le plaignant n'a pas caché ni camouflé sa faute. Il a collaboré avec le comité de discipline. De plus, il est marqué par ses agissements et la gravité de leurs conséquences. Son dossier disciplinaire ne comporte que 1 seul blâme. Le plaignant semble être un employé volontaire et dévoué à son travail. En outre, il a expliqué, avant l'imposition de la mesure, qu'un conflit avec un membre de sa famille était survenu la veille de la fin de semaine où se sont produits les faits en litige. Ce stress expliquerait sa désorganisation, sa prise de somnifères pour l'aider à dormir et sa consommation de drogue le lendemain pour le stimuler. Cette justification ne peut être remise en doute et l'employeur ne semble pas en avoir tenu compte, pas plus que de la règle de la progression des sanctions, en raison de la gravité du manquement, et même s'il s'agit somme toute d'une faute isolée au cours d'une carrière de 17 ans. Quant au lien de confiance, bien qu'il soit affaibli, il n'est pas irrémédiablement rompu. Selon la convention, l'arbitre peut substituer au congédiement une mesure mixte comprenant une longue suspension suivie d'une rétrogradation dans une autre fonction pour laquelle le plaignant est qualifié. En l'espèce, une suspension de 1 an et une réintégration dans une ou des fonctions autres que celle de préposé aux activités et pour lesquelles le plaignant est qualifié paraît raisonnable.