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Grief patronal irrecevable

Le grief patronal réclamant le remboursement de salaire versé en trop est irrecevable puisqu’il a été entrepris contre un salarié et non contre le syndicat, ce qui contrevient à l’économie générale du régime collectif des relations du travail et au monopole de représentation du syndicat.
5 novembre 2024

Intitulé

Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux de la Mauricie-et-duCentre-du-Québec et Syndicat du personnel paratechnique, des services auxiliaires et de métiers du CIUSSS de la Mauricie-et-du-Centre-du-Québec - CSN (Billy Dumas), 2024 QCTA 363

Juridiction

Tribunal d'arbitrage (T.A.)

Type d'action

Grief patronal réclamant le remboursement de sommes versées en trop. Objection préliminaire relative à la recevabilité du grief. Objection accueillie; le grief est rejeté.

Décision de

Me Nathalie Faucher, arbitre

Date

23 juillet 2024


Le syndicat allègue que le grief est irrecevable puisqu'il a été déposé contre le salarié, ce qui est contraire à son monopole de représentation, lequel subsiste même après la rupture du lien d'emploi. L'employeur soutient que le syndicat a été dûment notifié du grief, ajoutant que son objet est de récupérer des sommes dues à la suite d'une reconnaissance de dette personnelle du salarié et qu'il ne s'agit pas ainsi d'une mesure découlant de la convention collective.

Décision

La prétention du syndicat selon laquelle l'employeur ne peut poursuivre directement un salarié puisque celui-ci n'est pas l'une des parties signataires de la convention collective est exacte. Le monopole de représentation implique que le syndicat est le seul interlocuteur de l'employeur dans l'application de la convention collective. En l'espèce, le recours de l'employeur n'a pas été introduit en raison d'une reconnaissance de dette, mais bien à la suite de l'omission du salarié de donner suite à une disposition d'une entente de dernière chance qui avait été négociée avec le syndicat. Cette situation relève dans son essence de l'application de la convention collective, dans laquelle les «parties» et la «personne salariée» sont 2 entités distinctes. Il n'est jamais question de la «partie salariée». Il est manifeste que les rédacteurs de la convention collective ont utilisé l'expression «les parties» pour viser l'employeur et le syndicat uniquement. Par conséquent, l'article 11, relatif au processus de l'arbitrage, ne vise que «les parties» et non les salariés. L'ensemble du processus arbitral relève du monopole de représentation du syndicat, et le salarié n'y est pas une partie. L'employeur ne peut donc déposer un grief contre un salarié, le syndicat demeurant son seul interlocuteur dans le cadre de l'application de la convention collective. La rupture du lien d'emploi du salarié visé par le grief n'y change rien. Le monopole de représentation subsiste à l'égard de la période d'emploi pendant laquelle le syndicat représentait le salarié. L'employeur a exercé le recours approprié, mais contre la mauvaise personne. La notification du grief effectuée auprès du syndicat n'y change rien, l'identité de la partie visée étant un élément essentiel. Le grief tel qu'il est libellé est irrecevable.