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Suspension du cumul d'ancienneté

La suspension du cumul d'ancienneté décidé par l'employeur pour les salariés ayant participé à une grève constitue une mesure de représailles au sens de l'article 15 C.tr.
9 octobre 2024

Intitulé

Bellehumeur c. Centre intégré de santé et de services sociaux de l'AbitibiTémiscamingue, 2024 QCTAT 2249 *

Juridiction

Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Abitibi-Témiscamingue

Type d'action

Plaintes en vertu de l'article 15 du Code du travail à l'encontre d'une pratique interdite — accueillies.

Décision de

Anick Chainey, juge administrative

Date

28 juin 2024


Décision

Les plaignants estiment avoir fait l'objet de représailles à la suite de l'exercice légitime de leur droit de grève, l'employeur ayant suspendu le cumul de leur ancienneté pendant les 8 jours que la grève a duré — l'employeur n'a pas réussi à repousser la présomption légale — bien que les parties se soient référées à la convention collective pour appuyer leur thèse, il n'appartient pas au Tribunal de choisir l'interprétation qui doit prévaloir, mais il doit s'assurer que la conduite de l'employeur est défendable et n'est pas farfelue — dans la négative, la conduite de l'employeur pourrait dissimuler un prétexte pour arriver au résultat escompté — or, pour les personnes salariées à temps plein, l'employeur a emprunté la méthode de calcul réservée aux salariés à temps partiel — il a donc ajouté au texte de la convention un élément qui n'a pas été négocié entre les parties — de plus, on ne peut faire abstraction des 3 sentences arbitrales qui traitent de la même question que celle au coeur du présent litige — l'employeur soutient que ces décisions ne sont pas finales et qu'elles ne le lient pas — néanmoins, il est difficile de prétendre que l'interprétation qu'il avance est un motif «juste et suffisant» d'avoir réduit l'ancienneté, et ce, juste avant la deuxième vague de grève — en procédant ainsi, l'employeur a plutôt envoyé un message clair pour les séquences à venir, soit un avertissement visant à décourager les membres du syndicat d'exercer leur droit de grève — il ressort de la preuve que cette stratégie fonctionne — un tel comportement ne peut qu'ébranler le rapport de force durant une période charnière puisque les parties se trouvent en pleine négociation pour le renouvellement de la convention collective — l'employeur ne pouvait l'ignorer — il a pourtant fait le choix de suivre une interprétation qu'il ne croyait lui-même pas valable au départ, si l'on se fie à ses propres documents — la position privilégiée par l'employeur revêt toutes les allures d'un prétexte.

Suivi : Pourvoi en contrôle judiciaire, 2024-07-30 (C.S.), 615-17-001156-248.