lois-et-reglements / jurisprudence

Pénurie de main-d'œuvre, refus de congés : viole de la convention

L'employeur viole la convention collective en annonçant, aux termes d'une directive et au motif notamment de la pénurie de main-d'oeuvre, sa décision de refuser systématiquement certains types de congés sans traitement demandés par des enseignants.
14 octobre 2024

Intitulé

Syndicat de l'enseignement de Lanaudière et Centre de services scolaires des Samares (grief collectif), 2024 QCTA 288

Juridiction

Tribunal d'arbitrage (T.A.)

Type d'action

Grief relatif aux avantages sociaux. Accueilli.

Décision de

Me Jean Ménard, arbitre

Date

2 juillet 2024


Le syndicat conteste la décision qu'a prise l'employeur de refuser systématiquement, jusqu'à nouvel ordre, les congés sans traitement n'ayant pas été accordés lors de la séance d'affectation. Selon lui, cette directive prive les enseignants d'un droit que leur accorde l'entente locale. L'employeur justifie sa décision par une pénurie de maind'oeuvre qui, selon lui, met en péril sa capacité de remplir ses obligations et sa mission, comme organisme public, de respecter le régime pédagogique et les programmes d'études que lui imposent les lois applicables.

Décision

En utilisant le verbe «accorde» plutôt que l'expression «peut accorder», l'intention manifeste des parties était d'obliger l'employeur à accorder le congé lorsque toutes les conditions étaient remplies. La condition de «trouver» un suppléant suppose que le centre de services scolaire (CSC) a aussi l'obligation de chercher un candidat qui répond aux critères de compétence et de lui offrir le contrat lorsqu'un suppléant a été trouvé puisque c'est lui qui détient le pouvoir d'embauche. Or, la directive contestée a rendu impossible la réalisation de cette condition. En pareil cas, l'obligation a tout son effet selon l'article 1503 du Code civil du Québec. Il s'ensuit que l'employeur avait l'obligation d'accorder les congés demandés. Par ailleurs, l'employeur soutient que, étant donné que les enseignantes proposées pour les remplacements de congés partiels sans traitement étaient légalement qualifiées, il relevait de son droit de direction de les affecter en priorité aux postes réguliers qui n'avaient pu être pourvus par du personnel qualifié. Or, il n'y a aucune preuve que la décision de l'employeur ait pu contribuer à l'atteinte de son objectif de combler ses besoins, sauf dans 1 cas. De plus, il n'existe pas de droit de direction autorisant l'employeur à forcer un candidat à signer un engagement à temps plein alors que celui-ci souhaite plutôt un engagement à temps partiel sur un poste qui existe au sein du CSC; l'entente locale oblige ce dernier à trouver un suppléant sur ce poste. Même si nul ne conteste l'existence d'une importante pénurie de main-d'oeuvre avant l'année scolaire 2022-2023, il n'en reste pas moins qu'une pénurie comparable existait aussi dans les années précédentes et que cela n'a pas empêché l'employeur de respecter ses obligations contractuelles. Quant aux obligations statutaires de ce dernier, il y a un manquement dans son raisonnement puisqu'il n'a pas démontré comment les congés sans solde qu'il a refusés auraient mis en péril sa mission et le respect de ses obligations s'il les avait accordés (Centre de services scolaire de Sorel-Tracy et Syndicat de l'enseignement du Bas-Richelieu (CSQ) (Melony Gauthier et autres), (T.A., 2022-08-08), 2022 QCTA 575, SOQUIJ AZ51974241, 2023EXPT-2028).