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Caméra de surveillance et local syndical

Il convient, au moyen d'une ordonnance de sauvegarde, de contraindre l'employeur à enlever la caméra de surveillance qu'il a installée et qui permet de filmer les salariés alors qu'ils entrent dans le local syndical ou qu'ils en sortent.
13 août 2024

Intitulé

Syndicat des travailleuses et travailleurs de l'Hôtel Reine Elizabeth - CSN c. 3428826 Canada Ltd., 2024 QCTAT 1438

Juridiction

Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Montréal

Type d'action

Demande d'ordonnance de sauvegarde — accueillie.

Décision de

François Demers, juge administratif

Date

25 avril 2024


Décision

Dans le cadre d'une plainte pour entrave aux activités du syndicat et atteinte à la liberté d'association, le syndicat souhaite que le Tribunal enjoigne à l'employeur, pendant l'instance, de cesser de refuser l'accès au local syndical et d'utiliser une caméra de surveillance, d'assurer un traitement juste et équitable de sa gestion de toute mesure disciplinaire envers son personnel, de cesser de rendre publiques les mesures disciplinaires qu'il impose, dont celles visant les dirigeants syndicaux, et de transmettre sans délai, par courriel, la présente décision à chacun des salariés visés par l'unité de négociation — la demande s'inscrit dans un climat de relations du travail tendu, alors que s'amorce la négociation de nouvelles conventions collectives et que des mesures disciplinaires ont été imposées notamment à l'égard de dirigeants syndicaux, lesquelles font l'objet de griefs et sont aussi à la source de 2 autres plaintes — le Tribunal estime nécessaire d'intervenir afin de permettre l'accès des dirigeants syndicaux au local syndical puisque la présidente du syndicat s'y est vu refuser l'accès par l'employeur et que ce refus était précisément justifié par ses activités syndicales — en présence d'une telle apparence de droit, la faiblesse de la demande au regard des autres critères ne constitue pas un obstacle à l'intervention du Tribunal, non plus que le fait que la suspension en cause a été entièrement purgée — en effet, le Tribunal ne peut faire fi du contexte particulier de l'affaire — il est vraisemblable que d'autres mesures disciplinaires assorties d'une interdiction d'accès seront imposées par l'employeur et que ces éventuelles suspensions seront toujours purgées avant que le syndicat n'ait pu obtenir une audience devant le Tribunal, même aux fins d'une ordonnance provisoire — le Tribunal doit également intervenir quant à la caméra que l'employeur a fait installer à des fins de sécurité, mais qui permet en réalité de contrôler l'accès au local syndical — cette caméra représente un obstacle important à l'exercice de la liberté d'association — en effet, les salariés doivent être libres de consulter les représentants du syndicat sans contrainte de l'employeur — or, le positionnement de la caméra permet d'identifier les personnes qui ont accès au local syndical — d'ailleurs, la simple présence d'une caméra de surveillance dont le positionnement peut laisser croire que l'employeur est en mesure d'identifier les personnes qui se rendent au local syndical est nécessairement problématique — cela a vraisemblablement un effet intimidant sur les salariés, que la caméra soit en fonction ou non — à l'exception de la demande relative à la communication de la présente décision aux salariés, les autres demandes du syndicat sont rejetées parce qu'elles sont vagues, théoriques ou non fondées en fait.