Intitulé
Kharrat c. Fabrique Arhoma inc., 2024 QCTAT 669
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Montréal
Type d'action
Plaintes en vertu des articles 122, 123 et 123.6 de la Loi sur les normes du travail à l'encontre d'un congédiement et pour harcèlement psychologique — rejetées.
Décision de
Benoit Aubertin, juge administratif
Date
28 février 2024
Décision
Le plaignant, un boulanger, allègue que sa suspension lui a été illégalement imposée, le 7 août 2018, en raison d'une absence pour cause de maladie — or, à l'audience, il a plutôt expliqué qu'il s'était absenté du travail à la suite d'une altercation avec un collègue, ce qui ne constitue pas l'exercice d'un droit protégé — même si sa procureure soutient qu'il a confondu 2 événements et que son absence découlait plutôt de douleurs à un genou, le certificat médical déposé en preuve porte la date du 16 octobre 2017 et prévoit une réduction des heures de travail durant une période de 4 mois — ainsi, lorsque le plaignant a été suspendu, cette période était déjà terminée — puisque aucune absence pour cause de maladie concomitante de la sanction n'a été prouvée, l'une des conditions d'application de la présomption légale n'est pas remplie — la preuve n'ayant pas non plus démontré l'illégalité de la suspension, on ne peut la qualifier de pratique interdite.
En ce qui concerne la seconde plainte, la preuve a démontré que la communication entre le plaignant et ses collègues était souvent difficile — ce dernier, qui est malentendant, devait constamment déployer des efforts afin de bien se faire comprendre — il a été victime de plusieurs événements, notamment des collègues qui lui disaient de s'en aller lorsqu'il s'approchait d'eux et qui lançaient des bouts de pâte à pain et des objets dans sa direction afin d'attirer son attention — ces comportements, paroles, actes et gestes étaient hostiles et non désirés — de telles situations se sont produites à plusieurs reprises, et donc de façon répétée — le plaignant a été victime d'une conduite vexatoire, qui a porté atteinte à sa dignité et à son intégrité psychologique — celui-ci reproche également à l'employeur de ne pas préparer les salariés nouvellement embauchés à travailler avec une personne malentendante, ce qui ferait en sorte que ces derniers sont pris au dépourvu à leur arrivée — or, même si un manque de préparation de la part de l'employeur est regrettable, rien ne démontre qu'il aurait agi de manière hostile ou non désirée — le plaignant reproche également à ce dernier le fait qu'il devait accomplir ses tâches rapidement ainsi que le manque de communication quant au travail à venir — le Tribunal ne voit dans ces reproches que l'exercice du droit de direction de l'employeur et rien ne permet de conclure que celui-ci a été exercé de manière déraisonnable, arbitraire ou discriminatoire — bien que le plaignant considère avoir été victime d'une conduite vexatoire lorsque l'employeur l'a traité de «têtu», il n'en est rien, puisque ce dernier pouvait légitimement exiger la signature du manuel des employés en vertu de son droit de direction, d'autant plus que, au terme de discussions, le plaignant s'était engagé à lui remettre le document signé, ce qu'il a négligé de faire — le plaignant reproche aussi à l'employeur de ne pas avoir acquiescé à toutes ses demandes d'augmentation salariale — cet élément relève de l'exercice du droit de direction de l'employeur, et ce dernier a expliqué de façon crédible avoir refusé les demandes en raison du rendement insatisfaisant du plaignant — quant aux comportements des collègues, le plaignant confirme que l'employeur n'a jamais été témoin de quelque événement que ce soit et son témoignage quant au fait qu'ils en auraient discuté lors d'une rencontre est flou, changeant, peu détaillé et non corroboré — l'employeur ne pouvait respecter son obligation de faire cesser le harcèlement puisqu'il avait été privé de la possibilité d'intervenir afin de corriger la situation — par ailleurs, le plaignant confirme notamment que l'employeur rencontrait fréquemment les salariés afin de les instruire de la façon de bien communiquer avec lui et que, après son embauche, il l'a rencontré en présence d'un interprète afin de faciliter son intégration et de s'enquérir des modes de communication pouvant être utilisés — dans ce contexte, l'employeur a pris des moyens raisonnables pour prévenir les conflits pouvant découler des communications difficiles.