Parties
Bergeron c. Société en commandite Park Avenue-T
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Montérégie
Type d'action
Plainte en vertu de l'article 124 de la Loi sur les normes du travail à l'encontre d'un congédiement — accueillie
Décision de
Christian Reid, juge administratif
Date
13 juillet 2023
Décision
La plaignante, une directrice financière chez un concessionnaire d'automobiles, allègue avoir fait l'objet d'un congédiement déguisé — l'employeur aurait substantiellement modifié son horaire de travail, la distribution de la clientèle et sa rémunération à son retour d'une mise à pied temporaire liée à la pandémie de la COVID-19 —mécontente de ces changements, la plaignante a informé l'employeur qu'elle ne retournerait pas au travail tant qu'une solution mutuellement satisfaisante n'aurait pas été trouvée — les positions des parties n'ayant pas changé dans les jours suivants, l'employeur a informé la plaignante qu'il mettait fin à son emploi en raison de ses absences injustifiées — il n'existe pas de contrat de travail écrit entre les parties — rien ne permet de conclure que la modification de l'horaire de travail annoncée par l'employeur pouvait constituer une violation au contrat de travail de la plaignante — cette modification n'aurait pas eu d'effet considérable sur le nombre total de ses heures de travail hebdomadaires — en outre, la modification des horaires reposait sur des motifs organisationnels légitimes, soit la diminution des heures d'ouverture du commerce et la décision de l'employeur de ne plus ouvrir les samedis — ce dernier a exercé son droit de direction à cet égard — en ce qui a trait à la distribution de la clientèle, il est vrai que, depuis une quinzaine d'années, la plaignante s'occupait de façon exclusive de la clientèle associée au renouvellement des locations — les origines et le contexte de cette situation n'ayant pas été mis en preuve, il est difficile d'en déduire qu'il y avait quelque entente que ce soit entre l'employeur et la plaignante lui assurant une réelle exclusivité à cet égard — le Tribunal ne voit pas de violation du contrat de travail de la plaignante dans la décision de l'employeur de répartir cette clientèle parmi toutes les directrices financières.
L'employeur a contrevenu au contrat de travail de la plaignante en modifiant unilatéralement les conditions globales de sa rémunération — celle-ci était rémunérée exclusivement à commission et atteignait toujours ses objectifs — la décision de l'employeur de réduire le maximum des commissions de 35 % à 30 % des profits générés, après l'avoir diminué de 2 % l'année précédente, représentait une diminution potentielle d'environ 19 % de la rémunération globale de la plaignante — par ailleurs, la clientèle associée au renouvellement des locations assurait environ 25 000 $ en revenus annuels à la plaignante — la décision de l'employeur de la répartir entre la plaignante et 2 ou 3 autres directrices financières allait nécessairement diminuer considérablement sa capacité totale de rémunération — l'employeur a justifié l'ensemble des modifications annoncées en invoquant la recherche d'équité entre ses salariés — or, ce motif ne peut fonder un employeur à procéder unilatéralement à une baisse des conditions de rémunération convenues avec un salarié — la plaignante a fait l'objet d'un congédiement déguisé, lequel est annulé — celle-ci a confirmé ne pas vouloir être réintégrée en raison de ce qu'elle a vécu chez l'employeur — elle demande une indemnité pour perte d'emploi — or, aucune circonstance exceptionnelle permettant de faire droit à cette demande n'a été démontrée — le Tribunal est conscient des nombreuses frustrations qu'a vécues la plaignante dans les semaines ayant précédé sa fin d'emploi — il appert toutefois que l'employeur l'a toujours grandement respectée et que c'est à regret qu'il n'a pu la convaincre de demeurer à son service — la réintégration aurait été ordonnée si la plaignante n'y avait pas renoncé.