Parties
St-Pierre c. Corporation de développement faunique touristique et culturelle Faucus
Juridiction
Tribunal administratif du travail, Division des relations du travail (T.A.T.), Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, Bas-Saint-Laurent et Côte-Nord
Type d'action
Plainte en vertu de l'article 123.6 de la Loi sur les normes du travail (L.N.T.) pour harcèlement psychologique — rejetée
Décision de
Annie Laprade, juge administrative
Date
28 janvier 2022
Décision
La plaignante, une guide touristique, soutient avoir fait l'objet de harcèlement psychologique de la part de représentants de l'employeur — elle allègue que son congédiement constitue l'ultime manifestation de ce harcèlement — la version de la plaignante est retenue quant aux propos déplacés et sexistes tenus par son supérieur immédiat concernant le travail des femmes après 35 ans — comme elle approchait de la retraite, il n'est pas surprenant qu'elle se soit sentie visée — en mars 2020, la nouvelle directrice générale et un membre du conseil d'administration (CA) de l'employeur ont informé la plaignante qu'une enquête avait démontré qu'elle était la cause de l'ambiance désagréable sur les lieux de travail et qu'elle risquait de perdre son emploi à défaut d'un changement — le fait d'avoir prétendu qu'il y avait eu une enquête était trompeur puisque aucune vérification n'avait été faite auprès des personnes qui se seraient plaintes de la plaignante — le membre du CA a admis ne pas avoir laissé la plaignante intervenir ni discuter pendant cette rencontre — en dépit de cela, il a estimé que l'absence de dénégation et les excuses qu'elle avait présentées confirmaient la véracité des faits reprochés — cette façon de faire était abusive et constitue une conduite vexatoire — le congédiement imposé après que la plaignante eut refusé de participer à une autre rencontre avec l'employeur était injustifié — il n'a toutefois pas été imposé de manière vexatoire, aucun propos hostile ou insultant n'ayant été prononcé — les événements dénoncés par la plaignante n'ont pas la gravité ni la répétitivité requises pour être qualifiés de harcèlement psychologique — cette dernière n'a d'ailleurs pas démontré que cela avait créé un milieu de travail néfaste pour elle.
Plainte en vertu de l'article 124 L.N.T. à l'encontre d'un congédiement — accueillie — l'employeur soutient que la plaignante a manqué à son obligation de loyauté lorsqu'elle a critiqué la nouvelle direction lors d'un appel à l'ancien directeur général — or, même si elle était présente, la plaignante n'a pas participé à cet appel effectué par une collègue — il ne s'agit pas d'une faute — l'employeur reproche également à la plaignante d'avoir fait preuve d'insubordination en refusant de participer à une rencontre — le refus de la directrice générale de lui dire le motif de la rencontre et l'annonce de la participation du membre du CA ont pu créer de l'inquiétude chez la plaignante — cela ne justifie pas son refus, mais permet d'en comprendre les raisons — l'insubordination de la plaignante était fautive, mais ne présentait pas une gravité telle qu'elle justifiait un congédiement immédiat — comme la plaignante n'allait être rappelée au travail que 1 mois après la rencontre, l'employeur disposait du temps nécessaire pour lui expliquer son obligation d'y participer et les conséquences en cas de refus — or, il a omis de lui donner un avertissement et une réelle occasion de modifier son comportement — le congédiement était une mesure injuste qui a été appliquée de façon précipitée — le congédiement est annulé.
La plaignante a renoncé à être réintégrée dans son emploi — elle a droit au salaire qu'elle aurait reçu au cours de la saison touristique 2020 — elle n'a obtenu aucun revenu d'emploi pendant cette période — elle attribue les difficultés rencontrées dans sa recherche d'emploi à son âge et à la pandémie de la COVID-19 — le Tribunal ne peut lui reprocher d'avoir fait preuve de transparence et d'avoir informé des employeurs potentiels de l'audience à venir en lien avec sa fin d'emploi — la plaignante réclame également 5 000 $ pour compenser le préjudice moral qu'elle a subi — elle a vécu un état psychologique difficile à la suite de son congédiement — ses difficultés ont toutefois débuté au moment de la rencontre disciplinaire, qui l'a perturbée au point de la rendre malade — or, le Tribunal doit en faire abstraction puisque la plainte pour harcèlement psychologique visant cet événement a été rejetée — l'indemnité doit être évaluée en tenant compte des seuls préjudices découlant du congédiement — une somme de 2 000 $ paraît appropriée dans les circonstances.