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Tatouages et perçages : être de son temps

Les règles quant à la tenue vestimentaire et à l'image corporelle doivent évoluer et s'adapter au contexte actuel dans le respect des droits et libertés, en l'occurrence ceux de salariés présentant des tatouages et des perçages.
4 octobre 2021

Parties

Syndicat des travailleurs des services funéraires Dignité et Collins Clarke (CSI), une division de Service Corporation Internationale (Canada) (Réseau Dignité) (griefs individuels, Julien Filiatrault et autre)

Juridiction

Tribunal d'arbitrage (T.A.)

Type d'action

Griefs contestant un avis disciplinaire et un règlement d'entreprise. Accueillis.

Décision de

Me Amal Garzouzi, arbitre

Date

2 juillet 2021


L'employeur est un fournisseur de services funéraires, de crémation et de cimetière. Il a remis un avis écrit au plaignant, qui occupe le poste de porteur et homme de service, parce qu'il portait un anneau au nez. Dans le cas de la plaignante, une préposée aux familles, l'employeur a exigé qu'elle porte des gants pour couvrir ses tatouages. L'employeur soutient que le fait d'exiger que les tatouages et les perçages apparents soient dissimulés par les employés qui ont un contact régulier avec la clientèle constitue une atteinte justifiée au droit à la liberté d'expression et au respect de la vie privée. Il prétend qu'il existe un lien rationnel avec les objectifs poursuivis, soit de créer un lieu sobre, neutre et solennel pour accueillir sa clientèle, issue de diverses communautés religieuses et culturelles, et répondre à celle-ci.

Décision

Les tatouages ainsi que les perçages corporels sont des formes d'expression répandues dans toutes les couches de la société. Il faut une preuve directe et claire pour convaincre le Tribunal que cette façon de s'exprimer engendre une appréhension ou un malaise chez la clientèle de l'employeur. Une simple impression ou une opinion basée sur une perception ne suffisent pas. En l'absence d'une telle preuve, il est difficile, voire impossible, d'établir une corrélation entre le fait de voir des ornements sur les mains et l'apparition d'un inconfort chez une personne. La même chose s'impose pour les perçages. Conclure autrement à l'égard des plaignants serait de nature spéculative. Les mesures prises par l'employeur semblent plutôt reposer sur des préoccupations d'une autre époque. Elles sont d'ordre général et ne ciblent rien de particulièrement dérangeant chez les plaignants. Les règles sur la tenue vestimentaire et l'image corporelle établies et en vigueur depuis plus de 30 ans doivent évoluer et s'adapter au contexte actuel dans le respect des droits et libertés des salariés. Aucun lien rationnel n'a été établi entre les restrictions attaquées et les objectifs poursuivis par l'employeur.