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ANALYSE DES ÉTUDIANTS - Miser sur l’engagement…

Voici l’analyse du cas d’Aeroplan Canada, telle qu’elle a été présentée par l’équipe de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal, gagnante du tournoi, composée de Geneviève Robert-Huot, Cynthia Rozon-Lacelle et Gabrielle Ste-Marie Isherwood sous la direction de Daniel Beaupré, CRHA. Les concurrentes disposaient d’une heure et demie pour étudier le cas qui leur était soumis et de vingt minutes pour le présenter.

8 novembre 2011
Équipe de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal

Le transfert des activités des centres d’appel de Montréal et Vancouver d’Air Canada à Aeroplan comporte pour cette dernière certains enjeux en rapport avec sa culture organisationnelle. Considérons d’abord la situation actuelle… Dans un sondage, les employés d’Aeroplan ont indiqué quelques éléments qu’ils valorisent dans l’entreprise : les relations harmonieuses avec les collègues, les avantages sociaux, la responsabilité sociale de l’entreprise et le soutien des gestionnaires. Par contre, ils ont indiqué certains points à améliorer. Ce sont la gestion du rendement, la réputation de l’employeur, les procédures de travail, les ressources, les perspectives de carrière, la reconnaissance et les tâches reliées au travail.

Pour qu’Aeroplan puisse se classer parmi les cinquante meilleures entreprises au Canada d’ici trois ans, le plan d’action doit prioriser deux indicateurs d’amélioration, soit la gestion du rendement et la réputation de l’employeur. Les actions proposées dans le plan à l’égard de ceux-ci englobent les autres indicateurs ainsi que les éléments valorisés par les employés dans le sondage.

Trois enjeux prioritaires
Pour atteindre son objectif, Aeroplan doit tenir compte de trois principaux enjeux directement reliés aux indicateurs ciblés. L’entreprise doit favoriser l’engagement, en travaillant d’abord sur son système de gestion du rendement, ce qui se répercutera sur sa réputation en tant qu’employeur de choix. Elle devra ensuite faire en sorte d’homogénéiser sa culture; en effet, en raison de la fusion, deux cultures différentes s’affrontent dans l’organisation, ce qui se répercute sur le système de gestion de la performance. Le développement des compétences des employés constitue le troisième enjeu, qui pourra être vérifié par le système de gestion du rendement. Travailler sur ces trois enjeux contribuera au bout du compte à améliorer la réputation d’employeur d’Aeroplan. Toutes les mesures proposées dans le plan d’action en cinq étapes visent cet objectif : favoriser l’engagement, l’homogénéisation de la culture et le développement de la compétence des employés pour permettre à Aeroplan de se hisser parmi les cinquante meilleures entreprises au Canada.

Première étape : la communication
Il est important d’assurer dès maintenant une bonne communication avec les employés et de la maintenir tout au long de la mise en œuvre du plan d’action et pendant son suivi. Aeroplan doit communiquer aux employés des centres d’appel la vision qui était la sienne lors de l’acquisition. Pour ce faire, il faudra les réunir à Montréal, Vancouver et Toronto pour leur rappeler les objectifs de l’entreprise et les valeurs prônées par l’organisation. Ces valeurs doivent être mises en valeur pour que les employés s’en souviennent et y adhèrent; elles peuvent être affichées notamment dans les salles de repos ou dans l’intranet. Elles doivent non seulement être connues, mais aussi intégrées dans les processus et les pratiques quotidiennes de gestion des ressources humaines, par exemple dans les affichages de poste, dans le système d’évaluation du rendement, etc.

La communication visera aussi à assurer un suivi des attentes générées par le sondage chez les employés. Il s’agira de démontrer ainsi que les résultats du sondage sont réellement pris en compte par la direction. Une bonne communication démontrera l’intérêt de l’entreprise pour les employés et contribuera à créer un bon climat de travail. Les employés devront donc être mis au courant des points forts, des points à améliorer qui sont ressortis du sondage. Ils seront ainsi au courant des efforts faits par l’entreprise.

La communication est donc un processus qui se déroulera tout au long du plan d’action. Mais il est important de créer l’urgence, d’indiquer le pourquoi des changements et de les justifier pour réduire la résistance des employés.

La création d’un comité de changement, formé de membres de la direction et d’employés des opérations, permettra de planifier la nouvelle forme d’organisation du travail, de cibler les priorités et les modes de formation et la gestion de la performance. Grâce à ce comité, l’entreprise pourra obtenir la rétroaction des employés concernant les changements.

Deuxième étape : l’organisation du travail
Les changements dans l’organisation du travail constituent une étape qui doit être réalisée dans les trois premiers mois du plan, parce qu’elle va jouer directement sur la réputation de l’employeur et aussi sur le système de gestion de la performance.

Sur le plan de l’organisation du travail, on constate un manque d’homogénéité dans la culture, issue à la fois d’Air Canada et d’Aeroplan. Par exemple, les anciens employés d’Air Canada faisaient partie d’un syndicat dont ils partagent encore les valeurs. On constate également une contradiction entre les valeurs prônées par Aeroplan et le style de gestion des agents de centres d’appel. Mais en 2010, c’était la première fois qu’Aeroplan invitait ces agents à participer à son sondage sur le niveau d’engagement. C’est un peu inadmissible, parce ces employés sont gérés de façon différente : ils subissent plus de contrôles, ils ont des objectifs plus restrictifs, alors que dans l’ensemble de l’organisation, Aeroplan préconise davantage la collaboration et l’entraide.

Les changements dans l’organisation du travail vont aussi permettre d’accroître la flexibilité, par la formation d’équipes de travail polyvalentes, particulièrement quant au service à la clientèle. Aujourd’hui, il y a des services en interrelation; ainsi, une personne peut acheter de billets d’avion et les payer avec des points Aeroplan. Chaque employé doit donc être au courant des services offerts par Aeroplan, donc être polyvalent dans son poste. Et pour ce faire, il faudra vérifier la marge de manœuvre quant à l’autonomie et à la prise de décision, en vue notamment de conserver les jeunes employés.

Chaque équipe de travail devra être autonome, c’est-à-dire qu’elle visera une amélioration continue en s’entraidant constamment. Les superviseurs deviendront des facilitateurs plutôt que des contrôleurs, particulièrement en ce qui concerne les agents d’appel, qui faisaient l’objet de beaucoup de contrôle.

Troisième étape : la formation
Au cours des trois mois suivants, l’accent devra être mis sur la formation. Elle devra viser l’innovation et le transfert des connaissances, toujours dans le but d’améliorer le service à la clientèle et aussi de développer le potentiel de la relève. Mais il faudra tenir compte des styles de gestion et de la culture qui divergent selon les catégories d’emploi. En ce moment, la gestion de la performance ne permet pas vraiment de miser sur ces aspects.

Pour les agents des centres d’appel, par l’entremise de la réorganisation du travail, un jumelage des compétences assez informel pourra être établi entre les employés. Il serait intéressant de publier des capsules d’information dans l’intranet : ainsi, une fois par semaine, une capsule sur un produit, un service, un nouveau partenaire ou encore une astuce pour améliorer le service à la clientèle pourrait être affichée. L’entreprise continuera aussi de donner du coaching aux agents, ce qu’elle faisait déjà de façon assez régulière, mais dans une optique de développement des compétences et non de contrôle.

Pour ce qui est des superviseurs dans les centres d’appel, qui agiront désormais à titre de facilitateurs, il faudra adapter la formation pour soutenir l’appropriation de leur nouveau rôle. Une formation spécifique en gestion pourra notamment les aider à développer la polyvalence de leurs équipes de travail. Ils recevront également une formation en matière de coaching, de reconnaissance et de gestion de la performance, trois éléments qui se sont dégagés du sondage.

Quatrième étape : la gestion de la performance
Cette étape, qui sera réalisée entre le sixième et le douzième mois, est importante non seulement parce que les employés ont mentionné leur insatisfaction à l’égard de la gestion du rendement, mais aussi parce que l’organisation est en croissance. Il faudra aussi évaluer les compétences acquises par les employés lors de la formation.

Aeroplan doit mettre en place une politique qui permettra, étant donné la nouvelle organisation du travail, d’évaluer non seulement les équipes, mais aussi les performances individuelles. Dans le sondage, les employés ont mentionné que leur évaluation n’était pas en rapport avec la réussite de l’entreprise; il faudra donc donner aux employés une rétroaction constructive qui leur donnera l’impression qu’ils contribuent au succès de l’organisation. Selon la nouvelle politique, ils se verront fixer des objectifs organisationnels. Ces objectifs devront être SMART, c’est-à-dire simples, mesurables, atteignables, réalistes et limités dans le temps.

Évidemment, quand un comportement positif sera remarqué, il faudra donner de la reconnaissance. Oui, celle-ci pourra être en lien avec la rémunération, par exemple les augmentations salariales, mais il ne faut pas oublier que la reconnaissance non pécuniaire peut être tout aussi importante.

Aeroplan doit aussi continuer à enregistrer les appels. Toutefois, cette mesure ne doit pas être coercitive, mais plutôt viser à mesurer la qualité du service offert par les employés aux clients.

Cinquième étape : les activités sociales
Enfin, Aeroplan ne doit pas négliger la socialisation au sein de l’entreprise. Au cours de la deuxième année, il faudra donc organiser des activités sociales afin de consolider l’esprit d’équipe, dans la foulée de la nouvelle organisation du travail qui aura été instaurée. Ces activités devront mettre sur un pied d’égalité toutes les catégories d’emploi.

Ces activités sociales peuvent être organisées par régions, selon les intérêts des employés, et ainsi de suite. Par ailleurs, comme Aeroplan est une entreprise responsable socialement, pourquoi ne pas mettre en place des activités reliées à cette préoccupation, par exemple planter des arbres, tenir des activités de financement? Ces actions ne pourront manquer de favoriser l’engagement des employés et d’uniformiser la culture organisationnelle.

Le suivi
Le suivi et le contrôle de la mise en œuvre du plan se feront au cours de la troisième année du plan. Aeroplan devra mesurer le rendement de son investissement ainsi que l’atteinte des objectifs fixés. Il sera particulièrement important de connaître l’augmentation de l’engagement des employés et leur satisfaction à l’égard des changements. L’homogénéité de la culture sera mesurée en vérifiant le taux de participation aux activités sociales et l’adhésion aux valeurs de l’entreprise. L’augmentation des compétences, qui se fera sentir au niveau du service à la clientèle, témoignera pour sa part de l’atteinte des objectifs de formation.

C’est ainsi que ce plan d’action en cinq étapes amènera Aeroplan à travailler sur deux indicateurs, soit la gestion du rendement et la réputation de l’employeur, lui permettant ainsi de se hisser parmi les cinquante meilleurs employeurs au Canada d’ici trois ans.

Source : Effectif, volume 14, numéro 4, septembre/octobre 2011.


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Équipe de l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal