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ANALYSE DES ÉTUDIANTS - Quand une urgence survient…

Voici l’analyse du cas d’Ambulance Nouveau-Brunswick, telle qu’elle a été présentée par l’équipe de HEC Montréal, gagnante du tournoi, composée de Virginie Hamel, Lily Serreau et Sylviane Glaude. Les concurrentes disposaient d’une heure et demie pour étudier le cas qui leur était soumis.

22 septembre 2009
Équipe de HEC MONTRÉAL

Quand une urgence survient dans la province, ce n’est plus le temps de tergiverser. Il faut que le personnel de soin, les infirmières, les ambulanciers et ceux qui reçoivent les appels soient mobilisés autour d’une culture unifiée et positive et qu’il y ait un bon climat de travail.  

Avant la création d’Ambulance Nouveau-Brunswick (ANB) en 2007, les services ambulanciers de la province étaient assurés par divers organismes et agents contractuels, certains assujettis à des conventions collectives et d’autres non. Ces entités ont été regroupées pour former un seul réseau de secours médical d’urgence, dont tous les employés sont couverts par une même convention collective négociée en différentes unités. Par ailleurs, ce sont maintenant les Services médicaux d’urgence du Nouveau-Brunswick (SMU NB) qui assument l’élaboration du plan d’ANB et l’exploitation des services provinciaux d’ambulance. Ce mandat leur a été confié afin d’augmenter l’efficacité, d’améliorer les délais, d’augmenter les normes de formation du personnel et aussi d’accroître l’uniformité du service.

ANB est une entreprise du secteur public; elle vient tout juste d’embaucher 100 nouveaux employés, qui sont aussi syndiqués. Par contre, malgré une gestion excellente et une bonne uniformisation de chacune des pratiques, la société n’a pas encore eu le temps de préparer un plan stratégique de gestion des ressources humaines. C’est là le principal problème d’ANB…

De ce problème de base découlent quatre enjeux. Le premier est le manque d’engagement de la masse critique d’employés, soit les ambulanciers paramédicaux. Le second est le style de gestion qui devait être fondé sur les mêmes valeurs et les mêmes objectifs. Par ailleurs, et c’est le troisième enjeu, une mauvaise communication cause des problèmes entre le service des ressources humaines et les gestionnaires et aussi entre les répartiteurs et les ambulanciers. Le dernier enjeu concerne les relations du travail.

Plan d’action – An 1
Il est primordial d’élaborer le plan de gestion des ressources humaines et de l’aligner sur les objectifs de l’entreprise. Ce plan devra inclure un plan de communication et un plan de mobilisation. Dans le plan de communication, la direction devra déterminer ce qu’il faudra communiquer aux employés, notamment la mission, la vision et les valeurs, afin de les mobiliser. Ce plan permettra de pallier l’absence de communication entre les divers départements et surtout entre les professions.

D’un autre côté, il faut mobiliser les employés non seulement autour de la mission et des valeurs, mais aussi par un style de gestion uniformisé au sein de l’entreprise, qui devra tenir compte du fait que les employés sont syndiqués. Leur coopération est donc essentielle et, à cet égard, l’un des principaux intermédiaires est le syndicat.

Pendant cette première année, l’entreprise devra aussi mettre en place une excellente organisation du travail. ANB dispense des services de soins lors d’urgences. Il est donc très important d’établir une très bonne collaboration entre les membres de l’équipe lors d’une intervention et de bien transmettre aux ambulanciers l’information venant des réseaux qui reçoivent les appels d’urgence.

Pour cela, qui sont les intermédiaires? Ce sont les gestionnaires de premier niveau, les anciens dirigeants des petites unités de soin. Ces personnes doivent être formées à faire la liaison entre les appels et le personnel de soin et les ambulanciers.

Enfin, il faut établir un climat de confiance par la collaboration avec le syndicat et en appliquant une stratégie gagnant-gagnant.

Plan stratégique – An 2
La deuxième année du plan stratégique va voir d’abord la réalisation d’un plan de mobilisation. Par ce plan, l’entreprise incitera les employés à adhérer aux valeurs qui auront été choisies. Il faudra aussi aligner les pratiques sur les objectifs et sur le plan d’affaires. Précisons que les mesures proposées permettront d’améliorer en même temps la culture et les relations du travail.

ANB devra ensuite élaborer des outils de communication, dont l’intranet. Il est suggéré de créer une base de données qui permettra notamment aux employés d’aller chercher leur horaire de travail, allégeant du même coup la tâche des gestionnaires de premier niveau. Donc, avec ces outils de communication, ANB pourra élargir son message et soutenir l’ensemble de ses pratiques.

Finalement, pendant la deuxième année, ANB devra faire un suivi des actions et des résultats de l’an 1. Cela lui permettra d’évaluer les pratiques qui ont bien fonctionné et celles qui nécessitent des réajustements.

Résultats prévus
Parmi les résultats prévus grâce à la mise en œuvre de ce plan de gestion des ressources humaines, il y a évidemment la compréhension des objectifs stratégiques de l’organisation. On recherche une compréhension globale de tous les acteurs importants de l’entreprise, soit les gestionnaires de premier niveau, les trois catégories d’employés et évidemment le syndicat.

Ensuite, un autre résultat attendu est l’augmentation de la confiance entre les départements et aussi entre les employés, ce qui entraînera une amélioration des relations du travail et du climat organisationnel.

On vise aussi la collaboration entre les employés, qui commence à faire défaut à l’heure actuelle, ainsi qu’une culture organisationnelle positive et proactive.

Échéancier
Pendant les six premiers mois du plan, il sera extrêmement important de mettre en place le plan stratégique de gestion des ressources humaines. Il faut au moins que les grandes lignes, incluant mission, visions, valeurs, plan de mobilisation et de communication, soient officialisées.

Le plan de communication sera bidirectionnel, c’est-à-dire que la haute direction sera en mesure de présenter ses objectifs stratégiques, sa mission, sa vision et ses valeurs. Pour leur part, les employés pourront parler de leurs problèmes à la direction qui pourra ainsi les aider à les régler.

D’un autre côté, le plan de mobilisation sera mis en place et réalisé à plus long terme, soit d’ici deux ans. On ne peut pas demander aux employés d’arriver motivés au travail, du jour au lendemain. Il faut leur donner des raisons et des moyens d’y arriver. Finalement, on cherchera par la mobilisation à augmenter la collaboration interdépartementale.

Les mesures
Des groupes de discussion

La première mesure suggérée est de mettre en place des groupes de discussion. Le problème entre deux départements, ceux des répartiteurs et des ambulanciers, est le suivant : ils commencent à être en conflit. Il s’agit donc de réunir des représentants de ces deux groupes afin d’identifier le problème et de discuter des solutions envisagées par chacun pour le résoudre.

Des frictions surgissent également entre les gestionnaires et le service des ressources humaines. Il faut tirer cette situation au clair, parce que les objectifs de la direction passent par le service des ressources humaines et que ce sont les gestionnaires de premier niveau qui ont à gérer la réalisation de ces objectifs. Donc, il faut s’assurer que ces derniers comprennent bien les objectifs et sont mobilisés à cet égard. Il faut aussi qu’ils aient confiance en la direction pour pouvoir transmettre les messages aux employés. Des réunions, hebdomadaires au début, permettront d’uniformiser les styles de gestion des quatre directeurs et des seize chefs des opérations.

La formation
La deuxième mesure consiste à donner de la formation. D’abord, aux cadres, parce que quelques-uns d’entre eux n’ont pas l’habi­tude de travailler avec des employés syndiqués. Cela nécessite des connaissances, une compréhension globale des clauses de la convention collective, des relations du travail et de la manière de les améliorer.

Ensuite, l’entreprise pourra donner du coaching aux cent nouveaux employés pour bien les intégrer au sein de l’organisation.

Enfin, l’entreprise devra veiller au perfectionnement de ses employés. Les ambulanciers sont fiers de leur formation, de ce qu’ils sont capables d’accomplir. Pour les mobiliser, il faut les impliquer, les prendre en considération et leur permettre de se développer pour qu’ils puissent améliorer leur performance.

Utilisation progressive des moyens de communication
Il est crucial d’établir une communication entre les employés. Il faudra d’abord mettre en place un intranet. Comme les gestionnaires sont surchargés, la gestion des horaires est difficile. Il faut donc disposer d’un système qui permettra de réduire cette incertitude des employés quant à leurs horaires et l’intranet est un outil formidable à cet égard.

Deuxièmement, ANB travaille avec un organisme qui s’occupe de la gestion des appels d’urgence et de la répartition à l’échelle de la province, le Centre de gestion des communications médicales (CGCM). Il faut concevoir avec lui des pratiques de collaboration et des outils afin d’améliorer la gestion des appels et aussi d’établir une hiérarchisation des appels.

Innovation
Lorsque l’entreprise sera sortie du contexte de la récession, une mesure novatrice, qui coûte un peu plus cher, pourra être envisagée. Déjà appliquée par le Service de police de la Ville de Montréal, cette mesure a vraiment contribué à la mobilisation des personnes qui y travaillent. On a offert à tous les employés un téléphone multimédia de type iPhone ou Blackberry qui leur permet d’avoir accès à leurs courriels et à l’intranet. Il serait intéressant de faire de même chez ANB à la fois pour accroître la mobilisation et pour faciliter les communications.

Le budget
ANB compte quelque huit cent cinquante ambulanciers, ce qui représente une masse salariale d’environ trente-six millions de dollars. Le budget des mesures proposées représente entre 0,5 % et 1 % de la masse salariale, soit de 180 000 $ à 360 000 $. C’est un chiffre assez élevé en temps de récession. C’est pour cette raison que l’entreprise pourra en utiliser seulement une partie au départ pour mettre en place la communication, les pratiques de mobilisation et l’intranet. ANB pourra éventuellement consacrer plus de ressources financières à l’amélioration du climat de travail au sein de l’organisation.

Équipe de HEC MONTRÉAL

Source : Effectif, volume 12, numéro 4, septembre/octobre 2009.


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